Les Voitures de J.-L. Béghin pour SPIROU

C'est un honneur insigne qui nous est fait de pouvoir vous présenter, en "profitant" de ce dossier illustré sur les Voitures de Spirou, des images véritablement EXCEPTIONNELLES : une série de documents de travail de deux grands dessinateurs du Journal de Spirou, co-auteurs du mini-récit « Comment elle est née ? » signé Jean-Luc "ENGELS" au dessin, sur scénario de O. JOLY, avec la collaboration de... FRANQUIN !!!
Ce mini-récit, n° 201 de la série, est inclus dans le JdS n° 1345, un n° spécial "Auto" paru le jeudi 23 janvier 1964, repris dans l'Album (recueil) n° 92. Fait relativement peu courant, si le supplément Auto manque au recueil, le mini-récit, lui, y est bien présent.
Il retrace l’histoire de l’Automobile, depuis les temps les plus reculés, par l’excellent Octave JOLY, scénariste prolifique à qui l'on doit entre autres la majorité des Histoires de l’Oncle Paul. Le dessin est donc assuré par un certain... Jean-Luc Engels (seul M-R signé ainsi à priori)
. Un mini-récit d’exception, puisqu’ y paraissent, dessinés par Franquin en personne, SPIROU, FANTASIO et GASTON, aux premier et quatrième plats, ainsi qu’à la page 3, la principale dans le cadre de cette petite étude.

Jean-Luc "Engels" n'est autre que J.-L. BÉGHIN. Sous le pseudo Jean-Luc qu'il a utilisé en plusieurs autres occasions, il a déjà signé un premier mini-récit dans "Spirou" : Bertrand l'écraseur (MR n° 4), scénario de Cary Page (alias  Charles Jadoul), paru dans "Spirou" n° 1138 daté du jeudi 4 février 1960. À cette époque, comme il le dit lui-même savoureusement, il « "chevauchai[t]" deux magazines (Tintin et Spirou) avant de [s]e décider pour Spirou », dont l'ambiance un brin déjantée lui convient mieux.
Passionné depuis
toujours par l'aviation et le dessin, c'est tout naturellement que J.-L. Béghin oriente sa carrière vers le dessin de nature technologique : une "Histoire de la Jeep" pour un magazine de l'armée, une collaboration (non créditée) à l'album " Suspense à Indianapolis " (1966) de Michel Vaillant, etc.
Passé chez "Spirou" , où il officiera entre les décennies 1960 et 1980,  "Jean-Luc" y illustre le "Coin des dégourdis"  et la rubrique du "Fureteur", y remplaçant Eddy Paape parti chez... Tintin ! Il signe également plusieurs "Oncle Paul" de 1965 à 1970. Au début des années 70, il collabore avec Jidéhem sur de nombreuses rubriques "Starter" (Jeep lunaire, Simca Rallye 2, etc.)
Mais il va véritablement se révéler un Maître par ses articles et reportages consacrés à l'aviation. La série de posters et reproductions "Vous êtes dans le cockpit", entre autres, lui valent une incontestable célébrité; grâce à une perspective unique, et un souci du détail poussé à l'extrême, on a l'impression d'être
réellement aux commandes des avions représentés (Bell-XS1, Douglas C-47, F-16 ou B-747, pour n'en citer que quelques-uns). Toujours pour "Spirou", J.-L. Béghin effectue plusieurs reportages aux États-Unis, entre autres pour assister au décollage de la mission lunaire Apollo 16 (1972). Ces articles lui confèrent une notoriété sans cesse accrue dans le milieu de l'aviation, qui lui permet de voler sur de nombreux types d'avions. Il devient membre d'honneur du 350 Fighter Squadron de la force aérienne belge, ainsi que du 439 "Tiger" Squadron de la Royal Canadian Air force.
Fin 1976, J.-L. Béghin émigre aux États-Unis, d'où il poursuit sa collaboration au journal de Spirou avec des rubriques résolument tournées vers l'Amérique. Ses chroniques "Bons baisers de Californie", illustrées de photos et dessins, font découvrir, à des milliers de petits lecteurs européens, cet Etat et son art de vivre spécifique, sous tous ses aspects : culinaire, sportif, culturel, automobile, etc.
En 1982/83, il entame "Si l'Amérique m'était contée", décrivant hebdomadairement les 50 états d'Amérique. Puis, de 1984 à 1986, il couronne sa carrière à "Spirou" par les aventures de "Hubert B. Rainbow", série de gags en une ou deux planche(s), prétexte à faire découvrir la Californie aux lecteurs.
Sans abandonner le dessin, Béghin rejoint en 1982 le bureau américain d'"Air France", dont il devient près de vingt ans "chef des opérations au sol" à l'aéroport de Los Angeles.
Désormais "actif" retraité, J.-L. Béghin se consacre plus que jamais à ses deux passions, reprenant l'illustration de cockpits, et assurant la mise en valeur de son impressionnante collection d'objets "aviation". Par ailleurs, il collabore au magazine français Aviasport, où il publie une série de chroniques axées sur l'aviation en Californie.




Voici maintenant, révélés pour la toute première fois, une exceptionnelle série de documents retraçant les grandes phases de l'élaboration graphique du mini-récit Comment elle [l'Automobile] est née..., publié en 1964, pour les pages dues à la collaboration de J.-L. Béghin et de Franquin.
L'on pourra voir des pages encrées, d'émouvantes indications de couleurs dues à Franquin en personne pour ses personnages...
Nos remerciements les plus vifs s'adressent à Jean-Luc Béghin qui nous a, de son propre chef, communiqué ces dessins extraits de ses archives personnelles, et en a autorisé la publication sur ce site, qui s'en trouve grandement honoré.
  Le cabriolet mystérieux de Jean-Luc BÉGHIN  

Jean-Luc BEGHIN, O. JOLY, avec le concours d'André FRANQUIN :
« Comment elle est née ? » (M.-R. n° 201, 1964)
(Album n° 92)


Ci-dessus, la version originale encrée de la couverture de ce fameux mini-récit. Le berceau sur lequel se penchent attendris Spirou, Fantasio et Gaston abrite une voiturette RENAULT type A de 1898 (moteur monocylindre De Dion-Bouton de 273 cc, 1,75 CV), première voiture munie d'une boîte à prise directe. Le modèle est parfaitement reproduit !


Le document ci-contre, à gauche, mérite d'être considéré avec une particulière vénération : l'on peut y voir, par transparence, l'indication des couleurs choisies par FRANQUIN pour cette page de titre du mini-récit...
Noter qu'initialement, la signature du dessinateur était l'alors habituel Jean-Luc; l'addition "ENGELS" n'est venue que plus tard, pour la publication...





Version originale encrée de la page 3 du mini-récit.



Page 3 du mini-récit (en haut) : indication des couleurs par FRANQUIN.

À gauche ci-dessus, on reconnaît une CHRYSLER Valiant australienne, modèle 1962 (clone de la PLYMOUTH Valiant américaine 60/61) :




Vue plus précise des indications de couleur par FRANQUIN pour la page 3.







Le cabriolet sportif mystérieux dont SPIROU prend le volant, accompagné de Fantasio et Gaston.

Malgré qu'on en ait, il n'a pas été possible encore d'inscrire un nom sur cet attrayant petit bolide...
Dans son souvenir, Jean-Luc Béghin pensait qu'il pouvait s'agir d'un modèle italien; des recherches en ce sens n'ont pas abouti...
À la réflexion, l'auteur admet volontiers qu'il avait pu réaliser une création pure (au style alléchant !), en synthétisant les traits de plusieurs modèles existants.

On peut rapprocher ce modèle des Bizzarini GT 5300, pour la forme de la calandre; mais la voiture est apparue courant 1964...
Il évoque aussi l'avant d'une T.V.R. Grantura de 1960, mais sa partie arrière n'a aucun rapport, et surtout, elle n'a pas existé en cabriolet !

L'élément stylistique le plus intrigant est cette disposition des clignotants AV à l'extérieur des phares, qu'il ne nous a jamais été donné de rencontrer...






Dernière page du mini-récit, où l'on voit cette fois Spirou au volant d'une monoplace anglaise (en compétition internationale, les voitures portaient alors une couleur indiquant la nation de leur écurie, au lieu d'être comme maintenant affublées de criardes livrées publicitaires, à la sauce américaine).
Il s'agit de la Lotus 12 F.1 pilotée par Graham Hill au Grand-Prix de Monaco 1958.
Le pilote était sans casque (... mais pas dans la réalité) !!...


Pour finir sur une note assez émouvante, voici un photo-montage de JLB lui-même, le montrant à l'âge de 5 ans, au moment de la Libération de Bruxelles, posant fièrement devant "sa" Jeep Ford GPW d'aujourd'hui, un rêve d'enfant réalisé... En médaillon : le jouet qui lui fut offert pour Noël 1944... Le début de la passion de Jean-Luc pour les engins mécanisés ?...