En 2017, la branche néerlandophone de DUPUIS lançait une série d'albums spécifique intitulée Robbedoes Spécial, dont voici le tome 1. Ils étaient dessinés par Charel Cambré, sur un scénario de Marc Legendre.  Leur action se déroule "du temps de Franquin", à la fin des années '60 - au plus tôt à l'été 1968 pour être précis, notamment du fait d'un taxi de ce type, dont la base fut lancée en août 1967.

Le comte de Champignac a inventé un cerveau artificiel miniature en forme d’œuf, aux extraordinaires capacités, qu'il compte présenter lors d'une conférence scientifique à Saint-Toupet [St-Tropez], et qui attire les convoitises de bandits de tout poil... Il y envoie ostensiblement Spirou et Fantasio en voiture, pour servir de leurre à leur insu (... et au nôtre !), pendant que lui-même part tranquillement en train. Il se fait conduire à la gare par ce taxi Citroën ID 19 (les taxis "DS" étaient en fait essentiellement des ID Luxe, la finition de base).

Lancées en 1955, les DS/ID subissent un remaniement total de leur face avant pour l'année-modèle 1968, avec la disparition des ailes avant arrondies au profit d'ailes plates, ainsi que l'apparition de 4 phares sous verre, dont deux longue portée tournants (en option ou en série suivant les versions).
La version ID 19 (celle des taxis) laissera la place aux berlines D en septembre 1969.

  On l'a dit plus haut, de manière récurrente chez Tome et Janry, le comte s'absente de Champignac le temps d'une aventure... C'est le cas dans L'Horloger..., où le comte part remettre sur pied son petit-neveu Aurélien convalescent... Sans doute pour rejoindre la gare, on le voit donc au début disparaître dans un taxi que les hautes herbes du parc dissimulent à nos yeux dépités ! À la fin de l'album, le comte fait son retour au château, en compagnie du jeune Aurélien, dans ce taxi Citroën GS...

Fin août 1970, Citroën présente la GS, une limousine qui vient combler le fossé entre la populaire 2 CV et l'élitiste DS. Cette voiture à succès (1 896 742 exemplaires produits de 1970 à 1981, toutes versions confondues (hors GSA)) obtiendra le trophée européen de la Voiture de l'année 1971.

Le taxi emprunté par le comte, dont l'on n'a que cette unique vue AR, semble correspondre à la phase 1 du modèle; en septembre 76, la face arrière est redessinée, avec de nouveaux feux horizontaux de forme rectangulaire  et un large bandeau de coffre d'aspect alu brossé.
Noter qu'en septembre 1972, une version à moteur 1220 cc (7 CV fiscaux) vient épauler la 6 CV d'origine.

  Le comte de Champignac reçoit un nouveau champignon en provenance d'Afrique pour son laboratoire : après quelques analyses, il est convaincu qu'avec l'équipement adéquat (... notamment électrique !), il permet de produire un rayon pouvant colorer la peau en noir. Arès avoir fait sauter le disjoncteur lors d'une première expérience sur une souris blanche (« M. Albert »...), le comte s'éclipse le lendemain matin dès potron minet, à bord de ce taxi...

.... taxi qui est une Citroën BX phase 2 (présentée en juillet 1986), reconnaissable entre autres à ses clignotants avant blancs, de même hauteur que les phares. De manière surprenante pour un taxi, les jantes "en Z" de ce modèle désignent explicitement une version TZS (ex-TRS), pourtant 20 à 25 % plus chère à l’achat, à l'époque, qu'une BX de base !
La finition TZS existait sur les deux modèles BX 16 et BX 19 (1905 cc, 105 cv), plus chère d'environ 8 % que la 16 TZS : l'on postule donc ici une 16 TZS...

N.-B. : Présentée à la presse en juin 1982, la BX se plaçait dans la gamme Citroën entre la GSA et la CX; elle fut  produite globalement à 2 337 016 exemplaires (2 135 332 berlines et 186 827 breaks) jusqu'en déc. 1993.

La toute première case officiellement publiée du duo alors fraîchement intronisé aux manettes des Aventures de Spirou et Fantasio (Spirou n° 2253 du 18-VI-1981) nous montre... le comte quittant Champignac, pour se rendre à Mexico afin d'y participer à un colloque sur les champignons hallucinogènes ! Le ton était déjà donné...

C'est à bord de ce taxi Peugeot 504 (Diesel en principe pour un taxi) - un modèle que l'on a déjà vu furtivement jouer ce rôle chez Fournier (Des haricots partout, 1979) - que le comte rejoint l'aéroport de Roissy.
Ce taxi est un modèle de 1972 au plus tôt, au vu des panneaux de custode percés d'ouïes de sortie d'air et du rétroviseur extérieur. L'absence de dessin de l'avant (calandre) permet difficilement de préciser davantage la date.
On trouvera par ailleurs un très bref historique de la 504 sur la page des Taxis de Spirou.

 Comme il avait quitté Champignac en taxi (cf. ci-dessus) au début du Rayon noir, le comte y revient de même à la fin...
Hélas Tome et Janry savent se montrer avares en matière de dessin de voitures ! Là où un Franquin eût généreusement mis en valeur la ligne du modèle, eux ne nous montrent qu'une vue du... coffre (ouvert, il est vrai) !
L'inclinaison de la poupe évoque inévitablement une Jaguar XJ (série 3), avec toutefois 3 réserves significatives :

• Les feux AR de la XJ ne débordent pas sur les ailes.
• Les pare-chocs de la XJ se prolongent jusqu'aux passages de roues (cf. ci-dessus).
• Enfin, il est assez curieux pour le moins d'utiliser une luxueuse et plutôt sportive Jaguar comme taxi...
  

Quoi qu'il en soit, on notera tout de même que le croisillon intérieur de couvercle de coffre est plutôt conforme à la réalité de ces modèles...
Alors, restons sur une Jaguar XJ, faute de mieux... en admettant que le dessinateur n'a pas cherché à respecter scrupuleusement la réalité dans ce qui reste pour lui un détail dans son dessin général...
N.-B. : Les Auteurs avaient déjà représenté une XJ série 1 dans Qui arrêtera Cyanure ?